DNA a écrit :Sain parmi les « Saints »
Un match entre deux clubs de troisième division joué devant plus de 75 000 spectateurs. Surréaliste ? Même pas. Outre-Manche, Morgan Schneiderlin l'a récemment vécu avec le maillot de Southampton sur le dos.
L'engouement autour du football anglais est énorme. Pour preuve la finale de la Football League Trophy (Coupe réservée aux clubs de D3 et de D4) disputée par Southampton, dans un stade de Wembley comble et avec quelques... 44 000 supporters des « Saints » ayant fait le déplacement, heureux du dénouement de la rencontre (4-1 face à Carlisle). Cet autre monde, le Strasbourgeois Morgan Schneiderlin, formé au Racing, y évolue depuis plus d'un an.
« Dans les duels, ce sont des guerriers »
En dépit d'un palmarès quasiment vierge, avec l'équipe pro strasbourgeoise - il faisait partie du groupe qui a gagné la Coupe Gambardella en 2006 -, il restera dans son histoire, étant le plus jeune joueur à y avoir signé un contrat pro à seulement 17 ans. En quête de temps de jeu (trois matches joués en L 1), le milieu de terrain prometteur s'est exilé à la fin de la saison 2007-2008 dans un club alors en deuxième division, le Southampton FC. « Le Racing, c'est le club de ma ville. Je ne dois pas oublier les formateurs. C'est grâce à eux que je suis là. Mais je suis déçu de la manière dont se sont déroulées les choses. Professionnellement, je n'ai pas eu ce que je pouvais attendre. C'était une période où j'avais envie de jouer », explique-t-il. A Southampton, le Strasbourgeois de seulement 20 ans est titulaire. « J'ai fait une trentaine de matches l'an dernier. Cette saison, je les ai quasiment tous joués. Ce n'est pas comme en France, ici il n'y a pas de break pour Noël. » Au final, le club joue une soixantaine de rencontres au cours d'une saison.
« Je me suis demandé où j'étais ! »
Encore frêle à son arrivée, le Zellwillerois a été confronté à un niveau de jeu elevé. « Je me souviens d'un match contre une équipe de niveau CFA. J'étais sorti du terrain crevé tellement c'était rapide. Je me suis demandé où j'étais ! Ça joue bien au foot, mais dans les duels, ce sont des guerriers. Il y a beaucoup de contacts. Ils peuvent te marcher dessus. » Dans un championnat où l'on fait autant jouer les biceps que les jambes, Morgan Schneiderlin a dû s'endurcir. « Il y a beaucoup de musculation, et ce n'est pas de la petite muscu. Au début, le préparateur physique me chambrait, je n'arrivais pas à pousser beaucoup de poids, plaisante-t-il. En France, j'étais le joueur balle au pied, récupération-transmission. Ici, on m'a appris à être "un chien sur le terrain". »
« Notre projet est de remonter en Premier League »
Cette expérience lui permet de progresser et de devenir un joueur complet. Et c'est tout bénéfice pour un club de tradition, qui évoluait il y a encore cinq ans en Premier League et où s'est fait connaître un certain Peter Crouch. La relégation en League One (D3) avec 10 points de pénalité n'a rien changé. Racheté par un homme d'affaires suisse, le club est désormais l'un des plus riches d'Angleterre. Et les objectifs sont à la hauteur de l'investissement : « Ils sont en train de construire une équipe costaude. Le projet est de remonter en Premier League dans les trois-quatre ans. On y sera, c'est certain. » En tout cas, l'attente des supporters est énorme. Ils sont encore plus de 20 000 à assister à chaque rencontre à domicile malgré les déboires de l'an passé, et « entre 3 000 et 4 000 à faire les déplacements ». Les chiffres continuent d'impressionner l'Alsacien. Après un temps d'adaptation indispensable pour apprendre la langue et digérer l'éloignement de sa famille qui est restée en Alsace, Morgan Schneiderlin s'est totalement intégré. « J'étais le seul étranger au début, avec pratiquement que des Anglais. Je ne savais pas bien parler la langue. Et c'est ma faute, j'aurais dû écouter à l'école. Mais maintenant, je le parle couramment. » Un avantage pour profiter de la vie extérieure. « J'habite un beau petit quartier près du stade, où il y a beaucoup de footballeurs. On fait des sorties, on va boire des coups. Ça forge un groupe. C'est la mentalité ici, l'entraide. »
« Entre l'intérêt et l'achat, il y a une grosse différence »
Cette mentalité, il s'y est attaché et est prêt à évoluer encore quelque temps avec Southampton. Il lui reste deux ans de contrat. « Il y a eu une offre de Nantes l'an dernier, mais mon club l'a refusée. J'ai le choix : soit partir ailleurs ou bien rester, être sûr de jouer et participer à la remontée. J'ai pour ambition de côtoyer la Premier League », admet le milieu de terrain qui, d'après les rumeurs, serait suivi de près par Arsène Wenger. Morgan est passé outre. « Entre l'intérêt et l'achat, il y a une grosse différence. On peut être intéressé par une voiture et ne pas l'acheter. Si on la veut vraiment, on l'achète. » Morgan Schneiderlin affiche désormais une maturité à tous les niveaux.
Thomas Bourgois