Racing : Moslim après Dorsin ?
Recruté en juin, le défenseur international suédois quittera sans doute le RCS en fin de saison. L'espoir égyptien est pressenti pour lui succéder.
Mikael Dorsin a surpris tout le monde hier midi à la sortie d'un décrassage auquel le coach Antoine Kombouaré n'assistait pas. Il a surtout contredit une information qu'avaient donnée les dirigeants alsaciens fin juin lorsqu'ils avaient enrôlé le défenseur latéral gauche suédois, auteur du doublé coupe-championnat en 2002 avec son club de Djurgarden. À l'époque, Marc Keller n'avait pas masqué sa satisfaction d'engager pour 4 ans (jusqu'en 2007) celui que certains sites internet spécialisés présentaient comme l'un des grands latéraux européens de demain. « On le suit depuis un an et demi », disait-il alors, « il est jeune, tonique, Scandinave, ce qui veut tout dire. C'est un défenseur assez dur, un leader. »
Mais hier donc, Dorsin a levé le voile sur ses conditions à Strasbourg. « C'est un contrat un peu spécial dont vous devriez demander les détails à Marc Keller. Mais j'ai signé pour une saison, avec trois autres en option. Je peux très bien partir en juin, même si je veux saisir ma chance au Racing. Je l'ai ratée hier (samedi). Je vais attendre la prochaine. »
Keller et Kombouaré en Tunisie
Marc Keller ? Le directeur général du RCS est longtemps resté injoignable hier pour une raison simple : en compagnie d'Antoine Kombouaré, il s'était envolé pour la Tunisie où il a assisté en soirée à El Menzah au match qualificatif aux JO entre la sélection tunisienne et son homologue égyptienne (voir encadré). Vers 17 h, le président Egon Gindorf a ainsi été le premier à confirmer les révélations d'un joueur dont on ne louera jamais assez la gentillesse, ni le courage d'avoir accepté de s'exprimer après son calvaire de la veille (voir ci-dessous). L'industriel allemand a laissé entendre que le Suédois pourrait bien ne plus être strasbourgeois dans 3 mois (Ndlr : après la fin du championnat le 23 mai). « Une clause dans son bail nous permet de ne pas le prolonger au-delà de la saison en cours. La décision définitive n'est pas prise. Nous en discuterons ensemble cette semaine. Mais il est évident que ses performances sont notoirement insuffisantes. » C.Q.F.D.
On murmurait l'an passé que Djurgarden réclamait 2 millions d' € pour son international. Or, même si le Racing s'est engagé sur un prêt payant d'une saison (assorti, donc, d'une option pour 3 ans de plus), il est clair qu'il économisera un pourcentage élevé de cette somme s'il libère Dorsin en juin. Il pourrait dès lors investir sur un autre joueur déjà identifié depuis des mois («L'Alsace » du 29 mars 2003) : Ahmed Abou Moslim, international espoirs égyptien que son club Al-Ahly a évalué à environ 1 million d' €.
« Ne pas mentir aux gens »
Et comme le hasard (!) fait bien les choses, Marc Keller et Antoine Kombouaré étaient donc hier en Tunisie pour superviser un certain… Moslim. Finalement joint vers 20 h 30, le directeur du RCS refusait d'établir un lien entre son voyage au Maghreb et le probable départ de Dorsin. « Nous travaillons, c'est tout. Si, à l'époque, nous n'avons rien dit sur les modalités de l'accord passé pour Dorsin, c'est que Djugarden ne le souhaitait pas. Mais si le joueur en a parlé lui-même, je ne vais pas dire le contraire. Tout comme je ne vais pas mentir aux gens en disant que ses prestations nous satisfont. Nous voyons la même chose que les supporters. Ce qui lui arrive prouve que le choix des recruteurs n'est jamais facile, surtout concernant un jeune joueur étranger, pourtant capitaine des espoirs de son pays et régulièrement appelé avec les A. Après l'échec de la venue du Finlandais Janne Saarinen et notre impossibilité à recruter Moslim très vite, nous nous sommes tournés vers Dorsin.
Quand on négocie, on essaie de prendre un minimum de risques et un maximum de précautions. C'est ce que nous avons fait. » Ce déplacement en Tunisie accrédite en tout cas deux thèses : un, Moslim reste la priorité du club alsacien (seules des contraintes budgétaires ont retardé sa venue) ; deux, Mikael Dorsin sera sans doute prié de retourner à Djurgarden fin mai. Avant de débarquer à Strasbourg, il y était sous contrat jusqu'en novembre 2006.
« Le pire serait de perdre confiance »
Mikael Dorsin ne se voile pas la face sur l'indigence de ses récentes prestations, mais se dit convaincu de pouvoir encore s'imposer à Strasbourg.
C'était il y a un peu plus de deux semaines, avant le match contre Le Mans. Un journaliste venu de Landskrona, la ville d'origine des frères Farnerud, Pontus et Alex, était venu passer quelques jours à Strasbourg pour un reportage sur les trois Suédois du Racing, Mikael Dorsin compris. Au sujet de ce dernier, notre confrère ne cachait pas son étonnement de voir qu'il ne figurait même pas dans le groupe, mais avait été convié par Antoine Kombouaré à partir avec la réserve à Viry-Châtillon, en CFA. « Chez nous, c'était vraiment un très bon joueur. » Pourtant, avant-hier, Mikael Dorsin (22 ans) a livré face à Sochaux une prestation individuelle dans la lignée de beaucoup d'autres depuis son arrivée à Strasbourg. Fautif sur les deux buts de Frau et Isabey, comme il l'avait déjà souvent été ces 6 derniers mois («L'Alsace » d'hier), l'international scandinave est sorti à la pause, après avoir essuyé des sifflets plus de 20 minutes durant. Il reconnaît volontiers avoir été « mauvais », mais refuse d'abdiquer.
Mikael, vous attendiez-vous à traverser une période aussi délicate en signant à Strasbourg l'été dernier ?
En début de saison, je me sentais bien. Sur les 12 premiers matches que j'ai enchaînés (Ndlr : avant une suspension contre Bordeaux), j'en ai joué de bons et de moins bons. Mais l'équipe tournait bien et personne ne m'a montré du doigt. J'avais confiance. Je pensais pouvoir reproduire en France mon niveau de jeu en Suède. Mais je n'ai pratiquement pas eu de vacances depuis 15 mois, seulement 4 jours à Noël, et ma tête est fatiguée. Avant Noël, le coach a fait jouer Fabrice (Ehret). Ça m'a fait du bien de couper un peu. Je suis revenu en Coupe de France à Marseille où j'ai plutôt bien joué, avant d'être mauvais à Guingamp la semaine suivante dans une position d'arrière central. Mais je n'avais plus joué dans l'axe depuis au moins 5 ans, quand j'étais môme.
« Les sifflets ? Une expérience difficile »
À quoi attribuez-vous vos difficultés d'adaptation ?
À cette fatigue d'abord, au fait, aussi, que j'arrive d'un championnat suédois moins relevé et surtout très différent du football français. C'est la première fois que je quitte mon pays. Je n'avais donc aucune garantie de bien jouer en France. Je dois m'entraîner dur. En Suède, on pratique beaucoup le marquage individuel. Antoine Kombouaré préfère la zone. Un footballeur doit être flexible et s'adapter. Mais intégrer le système réclame du temps. Je ne suis là que depuis 6 mois, pas depuis 10 ans. En Suède, les défenseurs centraux sont moins proches l'un de l'autre. La défense est par conséquent plus étirée. Là , nous devons nous serrer et nous avons du mal à trouver les bonnes distances. Résultat : nous sommes à la peine sur les ballons dans le dos, moi le premier. Samedi, je n'étais pas assez près au marquage. Sochaux est une très bonne équipe, j'aime la façon dont elle joue. J'aime moins me retrouver en face. Je dois progresser dans tous les domaines, notamment en vitesse. Chez un footballeur, particulièrement chez les jeunes, il y a toujours des hauts et des bas.
Après les deux buts sochaliens, le public vous a sifflé sur chaque ballon. Comment l'avez-vous vécu ?
C'est la première fois que je suis ainsi pris en grippe. C'est une expérience difficile, qu'il faut supporter. Ma famille, ma copine m'y aident. Elles me soutiennent moralement. Si le public me siffle, c'est qu'il me juge mauvais. Ce n'est évidemment pas drôle. C'est même très dur, mais ça peut changer vite. Le public est toujours sévère quand on joue mal, mais il s'enflamme vite quand ça va mieux. J'espère qu'un jour, il me verra sous un autre jour. Et puis, n'exagérons pas. On ne parle pas de toute une saison.
« Je dois garder la tête haute »
Antoine Kombouaré a visiblement souhaité vous protéger en vous sortant à la mi-temps…
Je n'en ai pas discuté avec lui, je n'en sais donc rien, mais si tel est le cas, je peux le comprendre. Etait-ce la meilleure décision pour moi ? Honnêtement, je l'ignore.
Couper maintenant pendant un mois pour souffler serait-il la solution ?
En pleine saison comme ça, je ne crois pas. Ni pour moi, ni pour l'équipe.
Ne regrettez-vous jamais d'avoir signé à Strasbourg ?
Non. Les joueurs sont de bons amis. Ici, je me sens bien avec tout le monde. Je dois garder la tête haute. Je suis convaincu de pouvoir mieux faire. Je l'ai prouvé dans mon pays, en sélection et même sur certains matches à Strasbourg, comme Marseille ou Nantes. Je n'ai pas perdu confiance. La pire des choses serait de cesser de croire en moi.

... voila tout est dit ...