L'Alsace a écrit :Une cession sans anicroche ?
La vente du Racing à Alain Afflelou franchira sa première étape ce jeudi lors de l'assemblée générale extraordinaire de la Holding Sportinvest, qui détient 98 % de la Société Anonyme Sportive Professionnelle.
« Officiellement, je ne suis toujours rien au club. » Ainsi s'exprimait lundi Alain Afflelou, en préambule à l'interview parue hier matin dans ces colonnes. Officiellement, le lunetier n'est effectivement toujours pas propriétaire, ni président du Racing. Conformément aux textes de loi, l'opération se déroulera en deux temps. Ce jeudi, les actionnaires de la Holding Sportinvest, qui détient 98 % des actions de la Société Anonyme Sportive Professionnelle Racing, entérineront le principe de la vente. Pour activer le processus de la cession, il devra être validé par une majorité qualifiée des trois-quarts (plus une voix). Or, la répartition du capital de Sportinvest est la suivante entre ses six actionnaires : 60 % pour Egon Gindorf, 7 % pour Marc Keller, 7 % pour Pierre Schmidt, 4 % pour Patrick Adler, 2 % pour Thierry Wendling et 20 % pour Philippe Ginestet. D'après les statuts, la minorité de blocage se situe à 25 %. Ainsi, sauf alliance de dernière minute, Philippe Ginestet ne pourra-t-il pas s'opposer à la vente. « En fait, en cédant en juin 31 % de ses parts, Philippe Ginestet a perdu tout pouvoir d'intervention », explique un observateur du dossier. Un Ginestet dont Egon Gindorf et les autres actionnaires attendent la contre-attaque avant demain soir. « Philippe est toujours intéressé. Il peut faire une contre-proposition », indique celui qui, pour quelque temps encore, préside aux destinées du RCS. « Faux », répond notre témoin, « demain, les actionnaires décideront la vente du seul actif – la SASP Racing – détenu par leur société. Et sauf collusion suffisante pour atteindre la minorité de blocage de 25 %, l'affaire passera comme une lettre à la poste. » Philippe Ginestet, lui, reste évasif sur ses intentions : « Pour faire une contre-proposition, il faudrait déjà connaître la proposition d'Alain Afflelou, pour juger si elle est correcte. Or, à deux jours de l'AG des actionnaires, je ne la connais pas, ce qui n'est pas normal. On ne peut pas dire que les droits des actionnaires minoritaires soient respectés. Mais j'agirai dans l'intérêt du club, comme je l'ai toujours fait. »
Les cinq devront payer Ginestet
L'engagement d'Afflelou ? Entre 12 et 15 millions d'euros sur cinq ans. « Les autres actionnaires ne sont nullement tenus d'en dévoiler la teneur à Ginestet », poursuit notre observateur, « avec la majorité qualifiée, ils n'ont pas besoin de lui en référer. Sans alliance, Ginestet ne pourra rien faire. » Une alliance hautement improbable, puisqu'on voit mal l'un de ceux qui l'ont poussé dehors en juin revenir vers lui. « Il y a une solidarité entre nous », martèle le président Gindorf, « je ne vois pas pourquoi l'un des cinq sortirait du rang. » Une fois le principe arrêté par Sportinvest, la 2e étape sera lancée. Une AG extraordinaire de la SASP sera convoquée sous quinzaine, ce qui devrait repousser la vente officielle au-delà de la mi-décembre. Là encore, une simple formalité, a priori : Sportinvest cédera à Afflelou 51 des 98 % de ses actions de la SASP (dont le capital s'élève à 6,3 millions d'euros). À quel tarif ? Toute la question est là . « Ce n'est pas encore tranché », admet Egon Gindorf. Mais on s'achemine clairement vers une dévaluation d'un capital hérité des années Mc Cormack. « Avec Alain Afflelou, tout est clair », insiste l'industriel allemand à la retraite, « J'espère que tout le sera avec Philippe et que les gens seront raisonnables dans l'intérêt du club. Car cette vente a pour objet de faire franchir un cap au Racing, pas d'enrichir les actionnaires. » Le 11 novembre, Alain Afflelou a d'ailleurs été très clair à ce sujet : « J'investis pour le club, pas pour les actionnaires. » Dans l'immédiat, les cinq actionnaires actuels (Gindorf, Keller, Adler, Wendling et Schmitt) ne récupéreront donc rien des 3 millions (dont 2,7 pour le seul Gindorf) qu'ils avaient injectés en compte courant au printemps 2003, lors du rachat à Mc Cormack. « C'est exact », confirme Gindorf, « nous ne retrouverons pas notre mise tout de suite. Dans l'hypothèse – d'école – où le club ferait faillite, nous perdrions tout. » Avec l'arrivée d'Afflelou, la bande des cinq va même devoir remettre la main au portefeuille. Pas pour restituer le 1,5 million d'euros que le RCS doit encore à Ginestet (solde des 3,2 millions qu'il avait apportés en compte courant à l'automne 2004 et sur lesquels il a déjà récupéré 1,7 million depuis son éviction en juin). Mais pour racheter à l'ex-futur président les 31 % de Sportinvest qu'il avait accepté de lui revendre en juin, moyennant une très substantielle plus-value. 1,5 million que les cinq devront lui verser en juin 2006. Soit 50 fois plus que la valeur nominale (28 000 euros). Un profit phénoménal à propos duquel Afflelou n'entend pas banquer. « On ne peut pas dire que devoir ressortir de l'argent alors que l'on vend le club nous fasse plaisir », lâche Gindorf, « mais ça prouve bien que nous agissons dans l'intérêt supérieur du club. L'avenir nous dira si nous avons eu raison. »