DNA a écrit :Le compte en Suisse de Courbis
« Vos réquisitions pourraient bousiller une deuxième fois ma carrière » : jeudi, au 4e jour du procès des transferts de Marseille, Rolland Courbis a demandé l'indulgence du juge qui l'a longuement interrogé sur des commissions douteuses versées lors du transfert de Christophe Dugarry.
Après avoir joué sous les ordres de Courbis aux Girondins de Bordeaux jusqu'en 1996 puis à l'AC Milan, Dugarry avait été transféré du FC Barcelone à Marseille en décembre 1997 en décembre 1997 pour 6,4 millions de dollars (environ 38 MF, 5,8 M EUR).
La justice soupçonne que le transfert du futur champion du monde, l'un des 15 transferts jugés lors de ce procès, ait lui aussi donné lieu à surfacturation. Il a en tout cas donné lieu à de multiples transactions sur des comptes au Luxembourg, en Suisse et à Monaco, autant de rémunérations « occultes » versées au joueur et aux nombreux intermédiaires, selon l'accusation.
Une partie de ces commissions, soit 4 millions de francs, aurait abouti sur le compte en Suisse de Rolland Courbis, à la Corner Banca de Lugano, géré par Maurizio Delmenico, un proche de l'agent Licio d'Onofrio. Ce dernier est devenu ensuite président du Standard de Liège, propriété de Robert Louis-Dreyfus, actionnaire majoritaire de l'OM.
Dugarry surfacturé ?
« Pourquoi ouvrez-vous ce compte en Suisse ? », demande le président Vincent Turbeaux à Courbis, poursuivi pour complicité d'abus de biens sociaux. « C'est qu'en France, je suis saisi par le fisc et que la banque suisse m'est conseillée par Delmenico », répond le prévenu.
Sur ce compte numéroté, intitulé « Frizione », un nom « abracadabrant », reconnaît en souriant Courbis, est virée le 20 mars une première somme d'un million de francs, sur ordre de Delmenico et en provenance de la société IAM. Cette société, « la tirelire » de D'Onofrio, avait reçu la veille 8,9 millions de francs en paiement par l'OM des commissions relatives aux transferts de Ravanelli et Dugarry.
« Sur Dugarry, Courbis n'a rien à voir », soutient pourtant à la barre d'Onofrio, assurant que, sur ce transfert, « il n'y a pas eu de surfacturation. »
Une surfacturation illicite qui permet à Barcelone de reverser une « prime de départ » au joueur. Lors de son audition par la police, Robert Louis-Dreyfus (RLD), poursuivi pour abus de biens sociaux, avait admis être au courant de cette prime mais à la barre, il revient sur cette version.
« Vous étiez au courant de cette prime ? », demande le président. « Ce serait malhonnête de dire oui ou non », répond RLD. « Donc vous ne vous souvenez plus ? », rétorque le président. « C'est exact », répond RLD.
« Il se gave »
Courbis ne conteste pas avoir perçu 4 MF, mais il affirme qu'ils proviennent de son rôle dans le transfert d'Ibrahim Ba, de Bordeaux à l'AC Milan. « On dit : « Rolland Courbis il se gave », mais 4 MF c'est pas quelque chose qui me permet de me gaver, mais quelque chose que commercialement je mérite », plaide-t-il.
« La différence entre vous et moi, c'est que l'argent que je gagne, je ne l'élude pas du fisc », lui rétorque le président Turbeaux, très étonné que le transfert de Ba, pour 45 MF, ait généré 11 MF de commissions : « On croit rêver, tout le monde palpe de partout. Sur le même transfert, on va sortir dix briques réparties entre quatre ou cinq personnes ! »
Le président s'émeut au passage du rôle « illégal » d'agent occulte joué par Courbis, qui mélange allègrement ses casquettes d'entraîneur et d'intermédiaire.
« Dans une négociation, je n'ai jamais su la différence entre un mensonge et un argument commercial et à 52 ans, je ne le sais toujours pas », répond sans vergogne Courbis.
Aujourd'hui, le tribunal doit examiner les transferts de Cyril Domoraud et Claude Makelele.