DNA a écrit :Une si longue attente
Après l'épopée en coupe d'Europe des clubs champions achevée en quarts de finale face à l'Ajax, le Racing a dû attendre quinze ans avant de regoûter aux joies européennes. C'était en Intertoto, face aux Turcs de Genclerbirligi le 1er juillet 1995.
Le 9 mars prochain, Ruud Krol va se trouver projeté quelques années en arrière. En revenant à la Meinau, le désormais entraîneur d'Ajaccio se souviendra peut-être qu'il était venu décrocher là un match nul 0-0 en quarts de finale de la Coupe des clubs champions le 19 mars 1980 avec l'Ajax. Il se rendra vite compte que les temps ont changé ici aussi.
Ce qu'il ne sait pas, c'est qu'après cette rencontre, il a fallu attendre quinze autres années avant que le stade strasbourgeois ne hume à nouveau le parfum européen. Du bout du nez d'abord avec six matches d'Intertoto débutés contre les Turcs de Genclerbirligi (4-1) et ponctués par une victoire 2-0 chez le rival messin en août 1995 qui ouvrait aux hommes de Duguépéroux la porte de la coupe de l'UEFA, la vraie.
Face Maldini et Boban
Les Vencel, Djetou, Leboeuf, Dacourt, Pouliquen, Keller, Mostovoï, Sauzée ou Zitelli ne s'arrêtent pas là . Après avoir éliminé Innsbruck et Ujpest, ils résistent, en 16e de finale, au grand Milan AC. Celui des Desailly, Baresi, Weah, Simone, Maldini, Costacurta et Boban. Mais ils ne font que résister et s'inclinent 1-0 à Strasbourg et 2-1 à San Siro. Qu'importe, le Racing et ses supporters ont repris goût aux compétitions continentales. Et après un nouveau passage en Intertoto l'année suivante, le club strasbourgeois revit une épopée, une chevauchée presque.
C'est en 1997, dans la foulée d'une coupe de la Ligue arrachée aux Bordelais. Proisy a remplacé Weller, mais l'élan n'est pas encore cassé. A la peine en championnat, le Racing se sort d'abord d'un premier tour piégeux face aux Glasgow Rangers de Gascoigne et Laudrup en remportant les deux rencontres sur le même score (2-1), Baticle inscrivant trois des quatre buts alsaciens.
Le Racing élimine Liverpool !
Ce sont alors les Reds de Liverpool qui s'avancent. Même pas peur ! A la Meinau, le 21 octobre 1997, Zitelli marque deux fois et Conteh clôt la marque. Le Racing s'en va à Anfield Road le 3 novembre, avec trois buts d'avance, mais souffre le martyr dans l'antre du dragon. Dans les buts, Vencel est héroïque. Derrière, Ismaël, Okpara, Dacourt, M'Goghi ou Suchoparek résistent aux raids de McManamane, de Fowler, d'Ince ou d'Owen. Finalement, le Racing s'inclinera 2-0 et se qualifiera pour les 8es de finale face à l'Inter de Milan.
Et si le Milan AC rencontré deux ans plus tôt était grand, que dire de l'Inter qui compte dans sas rangs Pagliuca, Bergomi, Simeone, Ronaldo, Recoba ou Djorkaeff ?
Trop fort l'Inter...
A l'aller, devant plus de 25 000 spectateurs, le Racing pratique un football de rêve et marque rapidement par Baticle (11e') et Ismaël (19e'). Frappe le poteau, toujours par Ismaël. Cette fois, le scénario d'Anfield ne se reproduira pas, l'obstacle est trop haut. Même si Vencel sera tout simplement fabuleux au match retour et arrêtera un penalty de Ronaldo. L'Inter s'impose 3-0 et élimine le Racing. Depuis, ce dernier se contente d'amuse-gueules. En 2001, redescendu en L2, il s'incline au 1er tour contre le Standard de Liège (2-0 et 2-2). Un match d'abord remis en raison des attentats du 11 septembre. Et sa dernière campagne, la saison passée, bien que belle sur le fond, n'a pas remué les foules. La décrépitude de la coupe UEFA et la nouvelle formule n'autorisent plus les grands élans populaires autour de cette sous-coupe. Sauf à entrer dans le dernier carré, évidemment.
Un authentique exploit
Une nouvelle fois très mal en championnat, le Racing s'est pourtant hissé jusqu'en 8e de finale. Une habitude avec Duguépéroux finalement. En matant tour à tour les Autrichiens de Graz puis Bâle à Bâle et Tromsà¶e à la Meinau. Avant de réussir un authentique exploit en allant chercher un match nul (1-1) sur le terrain de l'AS Roma. Sans Pagis étonnamment écarté du groupe, ce qui précipitera son départ, mais avec Bellaïd, jeune défenseur de 20 ans qui viendra marquer le but égalisateur à une équipe composée de Nonda, Cassano, Totti, Panucci, Mexes, Dacourt ou Taddéi.
Les Bulgares de Lovetch passeront à la casserole ensuite en 16e de finale, mais le Racing ne pourra pas, une deuxième fois, se défaire de Bâle. L'histoire est d'ailleurs injuste mais très morale, parce qu'il faut se souvenir que si les Strasbourgeois avaient laissé filer le dernier match de poule face à l'Etoile Rouge au lieu de se battre pour arracher le nul (2-2), Bâle aurait été éliminé. Reste à savoir combien de temps il faudra maintenant attendre pour que le Racing respire à nouveau le parfum européen...
Le 3 novembre 1997, Yannick Roth et le Racing résistent au grand Liverpool et se qualifient pour les 8es de finale de la Coupe d'Europe. (Photo DNA)
Sauvé des eaux !
En ce mois d'avril 2003, le Racing est au bord de la disparition. Le club strasbourgeois va être sauvé par des entrepreneurs régionaux.
McCormack n'avait pas racheté le club que la rumeur de la revente courait déjà . Elle reviendra chaque année. Avec une régularité que seule la foirade en train de s'opérer aux yeux de tous et le peu d'entrain mis par le groupe américain à sauver ne serait-ce que les apparences peut expliquer. Jusqu'à cette bombe lâchée dans les DNA du 7 octobre 2002, deux mois après le licenciement de Chilavert. « L'idée est (aujourd'hui) de travailler avec un groupe d'Alsaciens passionnés, faire deux ou trois ans de vie ensemble, de mettre le club sur les rails puis de voir. Ensuite, il sera temps de parler de vente », expliquait Patrick Proisy. Et plus explicitement, à la question de savoir si concrètement la vente du club était une possibilité, il répondait : « C'est une possibilité, oui. Mais pas avant deux ou trois ans. Aujourd'hui, les conditions sont en train de se réunir ». Il lâche même un chiffre de mise à prix : entre 40 et 50 M€.
Mark McCormack sombre dans le coma
L'affaire ne prendra pas deux ans. Elle sera réglée en quelques mois. Dans le chaos, comme toujours. Après quelques psychodrames et règlements de comptes évidemment. En coulisses, Egon Gindorf, Patrick Adler, Marc Keller, Thierry Wendling, Robert Lohr et Léonard Specht s'activent depuis un an. Hypothèquent leurs maisons pour certains. Les deux derniers se retireront finalement et Arsène Wenger, longtemps tenté, ne viendra finalement pas. Mais le projet de rachat ira à son terme, encore accéléré par l'accident cardiaque de Mark H. McCormack qui a sombré dans le coma à la mi-janvier. Son groupe tentaculaire, par ailleurs plombé par des investissements hasardeux, se démantèle alors à une vitesse vertigineuse et le Racing est le premier à le quitter. Pour un euro symbolique et un chantier énorme à mener.
Le Racing a un avenir, ce qui n'a pas de prix
Le premier des nouveaux investisseurs sera de retrouver une crédibilité. Le second de reprendre son nom puisque la mention « Racing Club de Strasbourg » a, de longs mois durant, disparu du fronton de la Meinau. A moins que ce ne soit l'inverse. Il faudra aussi se sortir de la kyrielle de procédures engagées sur tous les fronts et éponger l'abyssal déficit (12 M€ environ) laissé en héritage. Bref, un club aussi mal en point qu'un rescapé de la route coloniale n°4. On peut aujourd'hui raconter ce qu'on veut, brandir quelques noms de joueurs qui ne se sont pas acclimatés, pas si nombreux que ça finalement (Gmamdia, Dorsin, Hosni voire Alex Farnerud pour les moins indulgents). Agiter les classements médiocres. Secouer le cocotier des joueurs partis trop tôt (Niang ou Ljuboja).
On peut toujours tout trouver à redire. Partout. A Lyon aussi, il y a des erreurs de casting ou des joueurs qui ne percent pas (Nilmar, Frau, Pedretti, etc.). A Lyon non plus, on ne peut retenir un joueur qui veut partir (Essien, Diarra). Au Racing, c'est pareil, les résultats en moins forcément, le problème est là . Pas vraiment ailleurs. Ce qui reste, c'est que ce club menacé de disparition en 2003 et d'être rétrogradé en CFA continue d'exister. En L2 oui, mais il est toujours dans le paysage français. Avec une coupe de la Ligue dans l'armoire aux trophées. Avec un déficit raisonnable comme tous les clubs de L2. Avec un avenir, ce qui n'a pas de prix.
On ne remplit pas le vide avec des plaintes
Aujourd'hui, celui-ci n'est plus incarné par le groupe de repreneurs dits « historiques ». Ils se sont déchirés comme s'ils s'étaient aimés un jour. Deux ans pile-poil après le rachat. Comme quoi, à Strasbourg, les histoires finissent mal en général. Egon Gindorf, le président sans doute le plus populaire de l'histoire du club, avait décidé de se retirer. Ni Marc Keller, ni Patrick Adler ne souhaitaient ou ne pouvaient prendre la présidence qui échoua alors virtuellement à Philippe Ginestet. Il y avait trop d'amour dans cette histoire-là finalement. Ginestet en fit-il trop ? Y-eut-il des susceptibilités égratignées ? Des maladresses ? Des attitudes pas claires ? Des propos blessants ? Un peu de tout ça forcément. De part et d'autre. Ce qui reste, c'est que s'en est suivie une empoignade fulgurante et dévastatrice qui conduisit dans un premier temps au départ de Ginestet. Puis, après le passage de la comète Afflelou, à son retour au terme de nouveaux imbroglios judiciaires et de tractations financières avec achats et rachats de parts sur lesquels on ne reviendra pas. Histoire de ne pas transformer chaque souvenir en arrêt du coeur. Finalement, Philippe Ginestet est resté maître à bord. Avec une nouvelle équipe. Un nouvel entraîneur, des nouveaux joueurs et de nouveaux objectifs. Parce qu'on ne remplit pas le vide avec des plaintes et qu'il faut bien avancer.
Le 29 avril 2005, à la veille de la finale de la Coupe de Ligue, l'équipe dirigeante du Racing - Marc Keller, Egon Gindorf, Philippe Ginestet, et l'entraîneur Jacky Duguépéroux - découvre le Stade de France. (Photo DNA - Cédric Joubert)
Pascal Coquis


 
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