Jamais un joueur de la génération 1979 n'avait atteint le plus haute marche du club strasbourgeois. Depuis samedi dernier c'est chose faite. Léonard Specht est devenu président après la démission de Philippe Ginestet :
Le 17 juin 1979, les héros strasbourgeois sont en congés depuis une semaine. Strasbourg tout juste auréolé de son premier titre de champion a terminé la saison par une élimination en demi-finale de Coupe de France contre Auxerre. Tant pis les vacances seront belles quoi qu'il arrive. A cette époque, Léonard Specht a 25 ans et se construit une carrière remarquable entre le club alsacien et la sélection nationale. Trente plus tard le voilà président du club. Joueur, entraîneur, responsable de la formation du RCS, « Léo » est désormais aux commandes de la maison bleue bien malade. Quel est son projet ? a-t-il les le moyen de redresser la situation ? La première véritable question est peut-être de savoir pour combien de temps Léonard Specht sera président. Il est possible que le quadruple champion de France assure un intérim sauf si le futur actionnaire majoritaire lui fasse confiance. Avec le changement de majorité attendue — Philippe Ginestet veut se désengager en partie — il est difficile de d'établir un véritable programme mais le travail doit être fait et au plus vite car le Racing possède une équipe sans entraîneur.
Dîner lundi soir
Partisan de Jean-Marc Furlan, « Léo » va devoir trouver quelqu'un d'autre. Gernot Rohr, son ex-coéquipier à Bordeaux dans les années 80, est Nantais depuis hier et l'autre piste sérieuse mène à Metz où Joël Muller, directeur sportif du FCM, est en fin de contrat. Trente ans après, un des hommes de 79 est à nouveau aux affaires. Une pure coïncidence ? Certainement. Evidemment. Mais on ne peut s'empêcher d'y voir un signe. Les Alsaciens ont souvent fait du bien au club. Lundi soir Léonard Specht et Gilbert Gress, qui dînaient ensemble avec d'autres joueurs de la glorieuse génération ont peut-être évoqué le sujet. « Il ne suffit pas d'être alsacien pour réussir. Si demain un chinois fait gagner le Racing, il sera considéré comme un dieu. Maintenant c'est vrai que les rares fois que Strasbourg était sur le devant de la scène… », lâche Gilbert Gress.… Strasbourg a brillé.
Autre acteur du triomphe vieux de 30 ans : Albert Gemmrich. Aujourd'hui Président de la Ligue d'Alsace de Football, l'ex-attaquant ciel et blanc milite pour un lien encore plus fort avec les clubs de la région : « Du moment que Philippe Ginestet a démissionné on ne peut que se réjouir de l'arrivée de Léonard Specht. J'espère que la sensibilité alsacienne sera prise en compte et qu'on fasse plus confiance aux jeunes alsaciens. En Alsace, il y a 90000 licenciés, je ne peux pas croire qu'on a plus de bons joueurs ! ». C'est dit. Albert Gemmrich veut faire confiance à son ancien coéquipier : « Léo sait ce qui l'attend. C'est une personne calme posée, il a mûrement réfléchi avant de s'engager. » Plus éloigné du microcosme strasbourgeois d'autres anciens joueurs voient d'un bon oeil l'arrivée de Léonard Specht. A l'instar de Roland Wagner 53 ans encore joueur à Drusenheim son village : « Cette saison, c'est partie en vrille. Maintenant Léo peut apporter un peu de sérénité. Il a l'expérience il sait ce qu'il fait. » Trente ans après, difficile d'être insensible à la coïncidence qui a propulsé un artisan de 79 à la tête du club même si les temps ont bien changé. Léonard Specht n'est pas le messie. Il le sait mais il peut être la clé de voûte d'un nouvel édifice.
Actionnaires dans le doute
En décembre 2005, le pôle d'actionnaires du Racing avait donné la priorité à Philippe Ginestet et rejeté la proposition du lunetier Alain Afflelou. Aujourd'hui certains regrettent et misent sur Léonard Specht élu dans l'urgence samedi dernier. Où va le Racing ? Les doutes sont apparus à différentes étapes du règne de Philippe Ginestet. Aujourd'hui, ils éclatent au grand jour. Tous unis derrière l'entrepreneur immobilier, séduit par son projet, son discours, les actionnaires étaient à 200% derrière l'un des plus jeunes présidents à la tête d'un club de Ligue 1. Mais le vent du renouveau s'est éteint progressivement. Rapidement même.
«J'ai fait le mauvais choix»
« Recruter des amis et même des membres de sa famille (N.D.L.R.: allusion à Pierre Ginestet, le frère du président à la tête de la cellule recrutement) me faisaient penser qu'il privilégiait ses contacts plutôt que la compétence », précise-t-il. Un an après le retour en L1, lorsque le Racing file à nouveau tout droit en L2 au printemps 2008, Egon Gindorf démissionne du Conseil d'Administration mais reste actionnaire. « C'est pour cela que j'ai quitté le conseil. J'étais un peu amer. Finalement, moi qui est donné la priorité à Philippe Ginestet, j'ai fait le mauvais choix ». Autre actionnaire Dominique Pignatelli. Autre mécontentement. Le président des SR Hoenheim ne comprend pas que le Racing se soit séparé de Jean- Pierre Papin. « Avec ses qualités et ses défauts, il a fait remonter le club en L1 », confie Dominique Pignatelli actionnaire à 12% de la holding EuroRacing (lire ci-dessous) « moi je suis pour la méritocratie et JPP méritait d'entraîner cette équipe en L1 », affirme Pignatelli. « Je n'ai pas été écouté. En revanche Philippe a suivi les conseils de mauvais génies » dixit Pignatelli. « Philippe a trop décidé lui-même. Il voulait tout faire. Un président n'est pas entraîneur. Les entraîneurs ? ils n'étaient jamais entendus », lâche Egon Gindorf. Aujourd'hui Egon Gindorf et Dominique Pignatelli ne souhaitent pas se désengager et compte sur Léonard Specht « un homme de consensus » selon DM. « Je lui donne tout mon appui pour rejoindre des eaux plus tranquilles et parler à nouveau de sport », soutient Gindorf à Strasbourg depuis la fin de semaine dernière qui a vu Léonard Specht la veille de son intronisation. En attendant on cherche surtout les euros nécessaires au rachat des parts de Philippe Ginestet. La situation économique complique les démarches. Qui peut, veut investir aujourd'hui dans ce club abonné aux problèmes ? D'après nos informations un pôle de repreneurs alsaciens réfléchit à la question.
Capital mode d'emploi
Depuis l'été 2007 la répartition du capital se compose de la holding EuroRacing qui détient 80% du Racing et de la société RLS79 créée par Robert Lohr et Léonard Specht lors de leur entrée dans le capital à cette période, investie à hauteur de 20%. Le désormais ex-futur président Philippe Ginestet détient 70% des parts de a holding. Le reste est partagé entre Egon Gindorf (17%), Dominique Pignatelli (12%) et Thierry Wendling (1%).