« Je ne suis pas l'Å“il de Moscou »
Pascal Camadini ne tient pas à  être exagérément mis en lumière. Le Corse se voit comme un conseilleur et un relais, pas comme un donneur d'ordres. Archive Jean-Marc Loos
Nommé coordinateur sportif il y a quelques jours, Pascal Camadini ne veut pas être considéré comme le bras armé de Philippe Ginestet, mais comme un ancien joueur du RCS déterminé à  donner un coup de main à  son club dans la période la plus noire de son histoire.
Depuis quatre ans et l'arrivée de son ami Philippe Ginestet à  la présidence du Racing, Pascal Camadini est l'homme qui a cristallisé, de la part de ceux qui le connaissent bien mal, le plus de procès d'intentions. Le Corse, presque alsacien d'adoption (il a joué au RCS de 1999 à  2008, avec un intermède à  Bastia de juillet 2005 à  décembre 2006), n'a pourtant rien d'un intrigant.
Actuellement en stage au club dans le cadre d'une formation universitaire (1), le Bastiais de naissance vient, à  37 ans, d'être nommé coordinateur sportif. Un rôle bénévole qui, à  ses yeux, « ne change rien. » Il n'entend pas s'immiscer dans la gestion sportive de l'équipe. Seulement mettre de l'huile dans les rouages.
Pascal Camadini, pourquoi Philippe Ginestet vous a-t-il confié un rôle de coordinateur sportif ?
Pour mon stage, j'ai dû étudier le fonctionnement du Racing. Je suis passé par tous les services et j'ai dressé certains constats. Avec Philippe, nous avons échangé sur le sujet, mais comme nous le faisons depuis très longtemps. Cette nomination me permet d'avoir accès à  toutes les composantes du club avec la légitimité nécessaire en interne. Mais au fond, le titre ne change rien, si ce n'est que je peux avoir des échanges directs avec les gens et être mandaté pour. Je suis davantage impliqué, mais je ne vais pas arriver avec mon étiquette de coordinateur.
« L'amitié n'ôte pas toute compétence »
Vous vous doutez que le refrain « tiens, le président place encore un de ses potes » va encore vous revenir aux oreilles…
Oui. Ce qui me fait peur, c'est l'interprétation de cette nomination. Les gens vont voir l'ami de Philippe Ginestet, pas le joueur dont la carrière pro a duré seize ans, qui connaît le milieu pro et, en toute modestie, y a une petite légitimité. Je ne veux pas être vu comme l'Å“il de Moscou qui observe et dénonce. Je tiens à  avoir une vision générale sur le club. En ce moment, il y a juste une urgence dans le groupe pro. Mais je n'interviens pas davantage aujourd'hui qu'il y a quelques jours. Un entraîneur est en place et il n'est pas du tout dans mes intentions de toucher à  ses prérogatives. L'amalgame entre mon amitié avec Philippe et mon nouveau rôle sera sûrement fait. Mais penser que l'amitié peut ôter toute compétence me paraît un raccourci un peu rapide. Dans d'autres clubs, à  d'autres époques, certains dirigeants ont intronisé des proches sans que ça ne pose problème. Il n'y a qu'ici où ça semble en poser.
Les joueurs vous ont-ils fait part de certaines observations ?
Rien de très particulier. Mais je crois qu'ils sont contents que quelqu'un soit là  pour faire le lien. Ils ont besoin de se sentir soutenus et il y avait nécessité en nombre. Ils savent que j'étais pro encore récemment. Peut-être me confieront-ils des choses dont ils n'oseraient pas s'ouvrir auprès du coach. Dans une situation comme la nôtre, même des détails peuvent être importants.
Après le changement d'entraîneur qu'ils ont implicitement obtenu, ne sont-ils pas face à  leurs responsabilités? N'est-ce pas à  eux de se prendre en main ?
Si, bien sûr. En ce moment, il y a des manques partout. Tout le monde doit faire des efforts, eux les premiers.
« Je ne veux rien imposer »
Pour la première fois de son histoire, le club est lanterne rouge de L 2…
Oui, mais il ne faut pas noircir exagérément le tableau, même si je ne vais pas vous dire qu'être 20e de L 2 est glorieux. Un club, c'est tout un fonctionnement, une situation financière. Et de ce point de vue, nous ne sommes pas à  la traîne. N'oublions pas que tout a été remanié avec les départs de Jean-Marc Furlan et Ferhat Khirat. Partout, j'entends dire que Philippe est un coupeur de têtes. Ça me fait sourire. Fallait-il maintenir Jacky Duguépéroux qui, même en pratiquant un bon football, est descendu en 2005-2006 avec une équipe dernière ou presque du début à  la fin ? Fallait-il garder Jean-Pierre Papin alors que toute la saison – et je m'en souviens très bien parce que je jouais – on nous a répété qu'en jouant ainsi comme des pieds, nous ne monterions jamais ? Fallait-il conserver Jean-Marc Furlan qui a fait descendre l'équipe et n'a pas pu la faire remonter ? Quant à  Gilbert Gress, ce n'est pas Philippe qui l'a choisi. Les gens oublient tout ça. Après coup, il est toujours facile de porter un jugement.
À la lumière de vos observations, que changeriez-vous ?
C'est délicat. La frontière est ténue entre donner un conseil et imposer quelque chose. Je ne veux rien imposer. Mais il est difficile de rester sans bouger quand ton club n'y arrive pas. À court terme, j'espère que Pascal (Janin) parviendra à  remettre la tête à  l'endroit à  des joueurs qui l'ont en ce moment à  l'envers. Personnellement, je serais partisan de leur rentrer davantage dedans. Mais ce n'est que ma sensibilité et chacun a la sienne. Je me sens investi. C'est toujours un plaisir de se voir proposer une mission. Mais je le fais sans prétention et sans prétendre détenir la vérité.
Recueilli par Stéphane Godin
(1) Il prépare un DUGOS (diplôme universitaire de gestion d'organisations sportives).