L'Alsace a écrit :La semaine de vérité
Entre l’arrivée du nouveau patron opérationnel Luc Dayan aujourd’hui, l’assemblée générale d’EuroRacing demain, le délibéré de la DNCG (2) mercredi et le 32 e de finale de Coupe de France samedi (20 h 45) à la Meinau contre Lyon, la semaine du RCS s’annonce chargée. Une fois de plus.
C’est un véritable tour de force que réalise le Racing depuis un mois : au fond du trou sportivement comme jamais dans son histoire (18 e de Ligue 2 à mi-saison), le club strasbourgeois vampirise le devant de la scène médiatique plus encore que les mastodontes du football hexagonal.
Et c’est loin d’être fini. Cette semaine, quatre événements majeurs nourriront son actualité : un, la première apparition aujourd’hui à la Meinau de celui qui prendra vraisemblablement la présidence fin janvier, Luc Dayan ; deux, l’AG de la holding EuroRacing qui validera la démission de Philippe Ginestet et intronisera à sa présidence le Suisse Raphaël Varone, déjà nommé le 21 décembre à la tête de Racing Investissements (1) ; trois, le délibéré de la DNCG attendu mercredi ; quatre, le 32 e de Coupe de France contre Lyon samedi (20 h 45) à la Meinau.
Après un mois placé sous le signe de la désorganisation et des dissensions, Luc Dayan va entamer ce lundi une opération séduction. Le chargé de mission engagé pour quatre mois par le nouveau propriétaire Alain Fontenla va tour à tour rencontrer les salariés et l’entraîneur, le maire Roland Ries et la presse. Il restera à Strasbourg mardi et mercredi pour baliser un terrain qu’il a commencé à déblayer dès lundi dernier, le jour même où Fontenla signifiait son éviction au PDG Julien Fournier. « J’ai l’habitude de ce genre de mission. Le récent communiqué publié jeudi par le maire Roland Ries est cohérent (« L’Alsace » d’hier). Tout comme les exigences de la DNCG (2). La perception qu’a l’environnement du processus qui s’est enclenché début décembre me paraît normale. Les inquiétudes aussi, d’autant que la communication du repreneur a été catastrophique — ce qu’il a lui-même reconnu — et qu’à Strasbourg, club instable depuis longtemps, le terrain était déjà fragilisé. À force d’accumuler les étages capitalistiques (3) et les modes de gouvernance, le Racing est le théâtre de beaucoup de non-dits et de rancœurs. Quand ils ont fait appel à moi, Alain Fontenla, que je ne connaissais pas il y a dix jours, et Ralph Isenegger m’ont confié avoir commis de grosses erreurs. Fontenla est un financier. Il s’est rendu compte qu’on ne prend pas le contrôle d’un club de foot comme d’une épicerie. Il a admis sa maladresse et son manque de connaissance du milieu du foot. Tout ce qui est arrivé depuis un mois est la conséquence d’une cession rapide, guidée par la volonté de Philippe Ginestet de se désengager très vite et de ne pas supporter le poids d’un déficit structurel de 7 millions pour cette saison. Beaucoup de choses n’ont pas été pensées lors de la transition capitalistique. Il faut désormais se pencher dessus. »
« En dernier ressort, c’est moi qui déciderai »
Contrairement à Julien Fournier qui a vite compris qu’il n’aurait pas les pleins pouvoirs promis, Luc Dayan, qui ne souhaite pas intervenir dans le secteur sportif, assure qu’il aura les coudées franches. « Ce qui se passe sur le terrain part de la base. Alors, il faut responsabiliser les joueurs et l’entraîneur. Ralph Isenegger, à qui j’ai demandé de devenir conseiller sportif, aura aussi un rôle à jouer. Mais en dernier ressort, c’est moi qui déciderai si ce qu’ils me proposent est conforme à la stratégie que je souhaite conduire. »
On le sait : les bonnes résolutions de l’An Neuf survivent souvent difficilement à la fin janvier. Qu’en sera-t-il au Racing alors que Luc Dayan annonce lui-même un mois de tous les dangers ?
Stéphane Godin
(1) La société qui possède EuroRacing et est détenue par le FC Football Capital Ltd dont Alain Fontenla est le propriétaire.
(2) La direction nationale du contrôle de gestion de la Ligue de Football Professionnel a demandé le 15 décembre à Fontenla de déposer 3 millions d’euros sur le compte courant du Racing et de les y bloquer jusqu’au 30 juin 2010.
(3) Le FC Football Capital Ltd détient Racing Investissements qui possède EuroRacing à 70 %, lequel est propriétaire de 78 % de la SASP.
« J’ai demandé un délai à la DNCG »
Le nouvel homme fort du Racing aimerait que le gendarme financier de la LFP lui accorde quelques jours supplémentaires, même s’il lui a déjà fourni jeudi un certain nombre d’éléments qu’elle réclamait.
Luc Dayan, le bruit court que vous auriez demandé un délai à la DNCG au-delà de la date prévue du 6 janvier ?
En réalité, nous lui avons déjà fourni jeudi un certain nombre d’éléments qu’elle demandait. Mais comme je n’entre en fonction que ce lundi et que je vais avoir besoin d’un peu de temps pour valider certains compléments d’information, je lui ai fait savoir que j’étais prêt à venir lui présenter ces éléments complémentaires fin janvier.
Quelle a été sa réponse ?
Pour l’instant, il n’y en a pas. J’ai, par mon intervention passée dans d’autres clubs de grandes villes (Lille, Nice, Nantes), souvent travaillé avec elle. Comme elle ignore tout d’Alain Fontenla, elle a fait son boulot et s’est blindée à travers des exigences presque excessives.
Comme les 3 millions qu’elle lui demande de bloquer sur le compte courant du club. S’il veut faire taire les critiques, pourquoi le nouvel actionnaire majoritaire ne s’exécute-t-il pas ?
(sec) Mais ces 3 millions sont anecdotiques. Ce qui m’inquiète, moi, c’est la trésorerie. Nous devons tout faire pour que le club évite la cessation de paiement. Le Racing est devant un mois de janvier crucial.
Justement, la décision de la DNCG attendue le 6 conditionnera beaucoup de choses. Notamment le mercato d’hiver qui s’ouvre ce lundi. Le club pourrait être interdit de recrutement…
Chaque chose en son temps. Ce n’est pas la DNCG qui va régler les soucis de trésorerie, les questions de gouvernance et les difficultés relationnelles avec la mairie. Mon expérience m’a prouvé que vous ne pouvez pas être présent dans le capital d’un club si la municipalité, qui est propriétaire du stade et accorde des subventions (Ndlr : au centre de formation), ne vous aide pas d’une façon ou d’une autre. A Strasbourg, c’est un peu comme à Nice quand on a fait appel à mes services : il faut régler des problèmes financiers, humains, organisationnels et sportifs. Si tout ça trouve une solution, le reste suivra. Je dis toujours que lorsqu’un président fait bien son boulot, on n’a pratiquement plus besoin de lui.
Vous avez bien conscience de l’urgence et de l’ampleur de votre tâche…
Justement. Dans l’urgence, il faut garder son calme. Si vous voulez tout faire en même temps, vous courez à la catastrophe. Je n’ai pas encore toutes les réponses. Mais si on m’a fait venir, c’est précisément parce que la situation était compliquée. Il va nous falloir quinze jours à trois semaines pour arriver à une forme de fonctionnement normal. Aujourd’hui, le club est en état de choc, presque en mort clinique. Ses fonctions vitales sont touchées. La priorité est de faire en sorte qu’elles redémarrent les unes après les autres, sans précipitation.
Cela signifie-t-il que les choses pourraient rester figées ces prochains temps, notamment en termes de recrutement ?
Concrètement, c’est possible. J’arrive ce lundi, mais Julien Fournier a encore autorité sur les mouvements de fonds et possède la signature requise pour toute transaction. Les ajustements vont demander un peu de temps. Mais l’important, c’est que le groupe sportif, l’entraîneur et le club sachent où ils vont. C’est mon rôle de leur montrer la direction.